Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article NATALIS DIES

NATALIS DIES. -I. GRrx.E. Pour les origines et même jusqu'à l'époque macédonienne nous manquons de renseignements précis' ; mais il est vraisemblable que l'anniversaire de la naissance a donné lieu de bonne heure à une fête religieuse très simple, dès que le calendrier a été fixé et qu'on a pu conserver les dates des naissances soit réelles, soit légendaires, surtout d'abord des héros protecteurs, des fondateurs de villes, des législateurs 2. A l'époque historique, les dates des naissances sont probablement inscrites dans beaucoup de villes, en particulier à Athènes 3, sur les registres des phratries, des dèmes et d'autres circonscriptions ; celles des grands hommes sont connues, de leur vivant, et conservées après leur mort 4 ; on célèbre les Amphidrolnia, qui sont à certains égards une fête de la naissance [AMPDIDROMIAl. Ces raisons ont, del faciliter l'établissement de t'êtes du même genre pour les anniversaires de naissance. On peut croire aussi que c'est à l'imitation des anniversaires humains qu'on célèbre les anniversaires de naissance des dieux, généralement à un jour spécial par mois 6, et qu'inversement la croyance à l'influence de la divinité au jour natal de laquelle un individu était né augmenta l'importance des anniversaires 6. On a donc le droit d'admettre, sans supposer l'imitation de l'Orient, que dès avant Ilérodote on fêta dans la famille le jour natals du père et peut-être d'autres membres de la famille, soit vivants, soit morts ; dans le premier cas la fête s'appelait tiâ yEvA9)s;n, dans le second cas 'tic yEVECta.. Le sens de ce dernier mot est discuté 6; mais, d'après sa racine et les idées des Grecs, nous devons le rapporter plutôt à l'anniversaire de la naissance qu'à l'anniversaire de la mort 10. Assez tôt aussi on fêta l'anniversaire de grands hommes, par exemple, d'Hippocrate" et probablement de Socrate et de Platon dans le cercle de leurs disciples '2. A Athènes, Solon institua une fête publique des morts, -ri ycxECc«, célébrée le 5 Boedromion 13. Les divinités invoquées dans les fêtes familiales étaient les OEol yen€9awt 14, appelés aussi bu.6y0vtot 1e; mais nous ne pouvons en reconstituer la liste1G les Mèdes, les Issédons, voir Plat. Alcib. 1, p. 121 c; Herod. 1, 133; 4, 26; Xen. Cyr. 1, 3, 10. 3 Gell. 3, 2, sur la détermination exacte du dies natalis à Athènes. 4 Pour Pindare, Euslath. Vit. script. éd. Wcslermann, p. 92, 53, et Plut. Quaest. coin,. 8, 1; pour Aristophane, S'col. Plat. Apol. p. 19 e; pour Hippocrate, Vil. Hippocr. éd. Kulm, III, p. 851. Athen. 4, 4, 19; Diog. Lacet. 3, 2; Proel. ad Hesiod. Op. et dies, 767 ; Plat. Convie. p. 203 c; Dion. Bal. Ars rhet. 3, 1, p. 243; Plut. L. c. et Seo?. ad. 9, 3, 2. Voir Lobeck, Aglaoph. 1, é 4. 6 Herodot. 82; Scot. ad L'lat. Apol. p. 0; Zenob. 6, 7. Herodot. 4, 26. x Le jour natal et son anniversaire sont souvent indiqués par les mêmes mots mpwzq uiio. tIµt pa 29,t.; 7,, ; ou •,it's';, sa 71.i:l,0,v. I.e texte d'Aristote (Met. 2, t2) oit il est question du premier jour est très obscur. -9 Suid. Ely.. Magn. s. b. v.; Phrynich. p. 103; Thomas. Mag. 75, 4; Ammon. p. 34; Herodot. 4, 26. Io Is. 2, 46 et 9, 7, se rapporte probablement à cette fête. li Vit. Hippocr. éd. Kuhn, III, p. 851. 12 Plut. L. c.; Diog. Laeet. 3, 2. 13 Bekk. An. 86, 20-25. Elle rappelle aussi probablement ,e arta (Deal. 41, il) et v . (Hesych. s. u. u,.ieta) et ne doit pas être confondue avec les Epitaphia. l4 Tel est le sens de ces mots dans Plat. Leg. 9, 879 d; 5, 729 c; Euripid. Ouest. 89; Aeschyl. Choeph. 900; Plut. Anrator. p. 760; Hieron. Ad Jouira. 1, 191. Mais dans Pindare (Ol. 8, 15; 13, 105; Pyth. 4167) ces mots signifient les dieux de chaque famille. 18 Phot. Tins. Lex. Plat. s. h. v. 19 Petersen (L. c.) y fait entrer assez arbitrairement Zeus (Dio. Chrvs. Or. 7, p. 568), Poseidon (Apoll. Rhod. Argon. 2, prooim.), Apollon (Plut. De Pyth. or. 16), les Moirai, liera, Demeter, les divinités nuptiales, Artémis, Aphrodite, Eileiihyia (Plut. De Is. et Os. c.48), les Génies des ancêtres, et les dieux dont la tète coïncidait avec la date de l'anniversaire. NAT 3 NAU Nous avons plus de renseignements après l'époque macédonienne, lorsque l'influence de l'Orient, puis de l'Égypte ptolémaïque et de Rome, modifie les coutumes grecques et donne encore plus d'importance à l'anniversaire de la naissance. La fête comporte alors souvent, outre les cérémonies religieuses : l'envoi de cadeaux'; des banquets, souvent avec musique, danses, mimes' ; l'envoi de souhaits de bonheur, de poésies, d'épigrammes ° ; la dédicace de livres'; et, au moins depuis le Il' siècle ap. J.-C., la composition de discours généthliaques'. Des corporations, comme les Attalistes, les artistes dionysiaques de l'IIellespont et de l'Ionie, célèbrent l'anniversaire de la naissance de rois divinisés tels qu'Eumène, Attale, de bienfaiteurs ° ; les écoles philosophiques honorent aussi de cette manière leurs fondateurs, soit de leur vivant, soit après leur mort: ainsi Epicure, par son testament, ordonne de célébrer à des dates fictives son anniversaire de naissance et ceux de ses frères et de deux de ses amis 7 ; des États rendent le même honneur à des bienfaiteurs, tels que Timoléon et Aratus 8, et â d'autres personnages ". II. RoME. -I1y aeu de tout temps, parmi les fêtes domestiques (feriae privatae)'", les anniversaires de naissance (natalis dies) surtout du père de famille, du patron ; ces jours, considérés comme heureux (dies candidas) 12, sont célébrés par des festins 13, des sacrifices aux Lares, au Genius natalis de l'homme, à la Juno natalis de la femmeu [GENIUS, JUNO] ; les arnis offrent des cadeaux, dédient des livres'. Dans les corporations, le natalis dies se confond avec l'anniversaire du dieu patron et avec celui de l'inauguration de son temple ; beaucoup de patrons offrent des dons ou font des legs aux corporations pour faire célébrer leur anniversaire, soit de leur vivant, soit après leur mort ' °. Parmi les fêtes publiques soit anciennes, soit récentes, on trouve d'abord, avec ou sans jeux, les anniversaires de fondation, les natales de plusieurs temples, par exemple d'Hercule, de Jupiter Ultor, de Quirinus, de Castor et Pollux, de Salus, de Sol et Luna, de Diane, de Fors Fortuna, de Mars, d'Osiris, de Sol Invictus 17 ; puis l'anniversaire de la fondation de Rome, le natalis Urbis confondu depuis une époque assez ancienne7e avec la fête des Parilia'9. Sous l'Empire on célèbre à toutes les époques, souvent avec des jeux du cirque d'un jour, le natalis erà yevi6),la) de l'empereur et des princes et prin cesses de la famille impériale, de leur vivant2''. Au début, ces fêtes subsistent après leur mort, mais à partir de 70 ap. J.-C., on ne maintient probablement que celles des empereurs divi ('c7 yevinta) "-' ; le calendrier de Philocalus mentionne les natales de dix-huit empereurs divi : Auguste, Vespasien, Titus, Nerva, Trajan, Hadrien, Antonin, Marc-Aurèle, Verus, Pertinax, Septime-Sévère, Alexandre, Gordien, Claude II, Aurélien, Probus, Constance Ie1', Constantin, et celui de Constance II régnant 22. On célèbre aussi l'anniversaire de l'avènement, le dies ou natale imperii, par des jeux du cirque, mais qui ne survivent que rarement à l'empereur 2'. CH. LEC61vAIN.